Auschwitz  4 février 2017

Avant de parler de l’arrivée de Simone Veil à la judenrampe, je voudrais faire un rappel de ce qu’ont subi les familles, les mères, les femmes victimes de cette abominable barbarie.

La Shoah ne se résume pas uniquement à l’existence des camps de la mort mais, c’est aussi tout ce vil processus qui y conduit .
La Shoah,

  • C’est l’enfant qu’on a caché en sécurité, chez des inconnus, pour lui sauver la vie, mais à qui on ne promet pas qu’il reverra ses parents, son frère ou sa sœur,
  • Ce sont des enfants qui n’avaient jamais lu autant de peur sur le visage de leurs parents, qu’ils croyaient invincibles,
  • Des enfants arrêtés, internés par centaines, épuisés, affamés qui ne comprennent rien à tout ça, qui trouvent que ce jeu étrange avait trop duré et qui ne souhaitent qu’une chose, rentrer à la maison, retrouver leur lit et leur nounours.

La Shoah,

  • C’est aussi, l’humiliation, l’atteinte à la dignité

Les paroles d’un père affaibli et résigné à ses enfants :
« Soyez courageux ! Les plus courageux que vous pouvez ! »

  • C’est, toutes ces femmes au parfum agréable et réconfortant de Maman, qui sentaient bon la lavande, la cuisine et le bonheur.

Elles, dont le rire était délicieux et qui consolaient comme elles pouvaient leurs enfants inquiets, parce qu’ils étaient une famille heureuse et pleine d’amour.

Puis la Shoah, c’est l’inconcevable, la folie de l’homme qui devient réalité:
On sépare les femmes de leurs petits, pour leur départ imminent vers la Pologne,
Elles hurlent de désespoir, elles s’accrochent aux vêtements de leurs enfants, à leurs cheveux,
Elles essaient de caresser leur visage et de prononcer leur nom une dernière fois pour ne pas l’oublier.
Voilà ce que fut la shoah et qu’on ne veut pas oublier, pour que cela ne se répète plus nulle part ailleurs.

Nous voici à la Judenrampe :
C’est ici qu’est arrivée Simone Veil ainsi que toutes les autres victimes, le 15 avril 1944 au soir, accueillies par les cris des SS et les aboiements des chiens.
C’est le quai sur lequel la majorité des convois des juifs de France et d’Europe sont arrivés à Birkenau, toutes les lignes de chemin de fer finissaient leur route ici, d’où qu’elles viennent. Puis comme vous le savez, il y avait la sélection, les valides d’un côté et les plus faibles, les vieillards, les femmes enceintes ou avec enfants de l’autre côté pour finir en très peu de temps assassinés en masse.

Le 30 juin 2017…
J’ai été submergée de douleur lorsque Simone Veil nous a quittée.
Elle fut ma marraine, mon mentor.
Elle m’a apporté la confiance, l’audace, la détermination dans ma vie.
Grâce à elle, j’ai appris à oser, à résister et à ne pas renoncer.
C’est un véritable héritage qu’elle m’a légué. J’en suis très consciente, et aujourd’hui nous sommes 70 femmes réunies pour honorer sa mémoire.
Elle m’a élevé vers l’excellence et m’a insufflé son énergie à franchir les obstacles : « Ne vous préoccupez pas de ce que pensent les autres. Faites ce que vous croyez être juste, c’est tout ! »

 Son arrestation
Le 30 mars 1944, âgée de 16 ans, Simone Veil est arrêtée à Nice par les Allemands, ainsi que sa sœur Milou et sa mère. Toutes les trois arrivent ici sur la rampe d’accès d’Auschwitz Birkenau, par le convoi n° 71.
Elle a 16 ans, elle est belle avec ses longs cheveux noirs, et ses yeux éblouissants, bleus comme le ciel.
Dès son arrivée on lui chuchote immédiatement de dire qu’elle a 18 ans.
Sur son bras gauche est tatoué le numéro 78651.
On peut dire de Simone Veil : Ah, quel beau destin, Magistrat, Ministre, Présidente du Parlement Européen, Membre du Conseil Constitutionnel.
Et pourtant…
Il avait commencé sur une voie de chemin de fer qui menait à la mort, à Auschwitz Birkenau, cette grande machine à tuer.
Ici elle perdit sa jeunesse.

Son retour avec Jacques Chirac en 2005
Le 27 janvier 2005, en tant que Présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, elle inaugure la réhabilitation de la judenrampe, aux côtés du Président Jacques Chirac et Serge Klarsfeld, auteur de cette initiative.

Birkenau, symbole absolu de la Shoah, Ce camp dédié à la solution finale.
Lors de la cérémonie de commémoration, Simone Veil déclarait :

« Aujourd’hui je ne suis pas émue. Il n’y a plus la boue, il n’y a plus le froid. Il n’y a plus surtout cette odeur. Le camp, c’était une odeur, tout le temps. »
Elle a ajouté : « Pendant toute la cérémonie, il y avait quelque chose qui m’intriguait. J’ai eu un peu froid, comme tout le monde. Et je me demandais comment on avait pu résister à tout ce froid. Jusqu’à -30°…
Je n’arrive pas à me souvenir comment on faisait.
On n’avait rien.
Est-ce qu’on se mettait du papier sur le corps ? Ou bien des vieux sacs de plâtre ?
Pendant toute la cérémonie, j’essayais de m’en souvenir, et je n’arrivais pas. »
Voilà pourquoi nous sommes là pour elle et pour toutes les femmes victimes de la barbarie, aujourd’hui, car elle nous a montré la voie.
Merci Simone !

Je ne vous cache pas que la visite va être très éprouvante, difficile. Vous n’êtes pas obligées d’entrer dans tous les salles. Mais n’oubliez pas que nous sommes là pour vous et vous soutenir dans ce long parcours.

Samia ESSABAA
Samia ESSABAAPrésidente